La Discothèque Idéale
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MOLITUDE / 14-08-2001

 
 L'homme, courageusement, sans un mot plus haut que l'autre, affronte le mois d'août dans la capitale. Car il en faut et l’homme est de ceux-là. De ceux qui font que Paris reste Paris, Levallois reste Levallois et les vaches bien gardées, pendant que ses collègues, ses congénères, ses semblables, ses amis même, en profitent pour être, eux, en vacances.

Affrontant le vide du périphérique et les travaux des couloirs de bus désormais assez large pour en faire circuler trois de front, l'homme qui n'est pas en vacances au mois d'août se faufile à travers la capitale. Esquivant d'un coup de volant sec mais souple, la voiture de province, il contourne habilement le bus de touriste japonais et se rappelle de justesse que les voies sur berges sont fermées. Réservées aux piétons qui sont nombreux au mois d’août, comme chacun le sait.

Et oui, contrairement aux idées reçues des estivants, il s'en passe des choses à Paris au mois d'Août.

On a fermé les voies sur berge. Concerts de klaxons, embouteillages et pétitions, plus deux ou trois alertes à la pollution, il fallait vraiment oser, ou même y penser voilà qui est fait. Il paraît que les Verts, encouragés de ce succès sans précédent, auraient déjà décidé de reconduire cette mesure l'année prochaine.

Question météo : Il a fait très chaud, très moche, très beau, pas de vent, on a eu des alertes de pic 3. Bref, un mois d’août, quoi.

Le mois d’août : un mois socialement éprouvant, même à Paris. Qui a pu échapper aux Cassandres nous informant secondes après secondes, jour après jour du ralentissement de l'économie mondiale ? Toujours aussi optimistes ces chers économistes et ses spécialistes de la prévision " que là, cela sent le ralentissement de l'économie mondiale..." ce qui est d'ailleurs souvent le titre de l'article lui-même. Merci de l'info.

Force est de reconnaître que les plans sociaux se suivent et se ressemblent hélas. La mariée était trop belle et l'occasion trop bonne. C'est le marché et puis les actionnaires qui se soucient des licenciés comme de la couche d'ozone. Dont acte: 

AOM air liberté 1405

Crédit lyonnais 2300

Philips 7000

Ericsson 10000

3M 5000

Bayer 4000

Pour les plus étourdis, les chiffres ci-dessus sont des emplois supprimés, des gens qui perdent leurs postes, si vous préférez. Comme vous et moi, quoi. Enfin, plutôt comme vous si cela ne vous dérange pas. (Non, parce que moi je bosse, là, même au mois d'août donc cela ne m'arrange pas de le perdre...)

Enfin, bref, vous l'aurez compris, il s'en passe des choses au mois d'août. Et encore, vous aurez remarqué que l'homme, dans son immense bonté ne vous a pas parlé du Moyen-Orient (où il n'y a pas de mois d'août qui tienne) ou des attaques de banques, des disparitions, des viols et des kidnappings, on n'est pas là pour ça. Mais il faut reconnaître que certaines choses et catégories socioprofessionnelles ne prennent jamais de vacances. ( Prenons un exemple au hasard : les emmerdements. Les emmerdements ne prennent jamais de vacances, on pourrait penser qu'ils doivent êtres fatigués mais non, c'est non qu'ils fatiguent. Étonnant non ? (comme disait le regretté M. Pierre Desproges)

Un autre exemple ? La mort. C'est brutal certes mais indéniable. La faucheuse ne prend pas de vacances. Cela se saurait.

Enfin, comme nous l'apprend un quotidien qui ne semble pas avoir grand chose à se mettre sous la dent en ce huitième mois de l'année, même l'exécutif, à l'image du pays, s'assoupit et est majoritairement en vacances. Un président dans le Var au fort de Brégançon, un Premier ministre dans l'île de ré, d'autres ministres, qui dans le Lubéron, qui en Corse.

Pas de doute se dit l'homme, à part moi et quelques exceptions, c'est bien le mois d'août et le mois des "vacances". Le mois des vides, des absences, des vacations, des absences et des loisirs.

L'homme, seul, face aux jours à venir, reste concentré et stoïque dans sa vigie, seul, courageux, prêt à conter et raconter quoi que ce soit si quoi que ce soit qui interviendra pendant ce qu’il reste du mois d'août. L'homme, encore et enfin, qui se relisant se dit que, des vacances, prendre, peut être, il lui faudrait.

Oui, des vacances prendre il faudrait. Voilà une bonne raison de se lever le matin.

 

 

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