La Discothèque Idéale | ||
The Little Rabbits : La Grande Musique |
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" Écoutez moi tous bande de cons ! On va se
faire une petite ballade. Quelque part en bagnole, avec une poule ou deux,
qu’importe. De toutes façons on est tous plus ou moins
bourrés ". Un single débutant par ces mots là ne peut pas être foncièrement mauvais… Et le nouvel album des Little Rabbits est même franchement réussi, mélange surprenant de textes d’inspirations parfois furieusement 60’s et de musique funky. Dédaignant quelques peu les guitares, les Little Rabbits laissent leur musique s’imprégner d’acoustique par le biais de trompettes, de flûtes et de percussions qui nous plongent dans un univers singulièrement dépaysant, proche des univers des bandes sons de films seventies. On appréciera particulièrement dans le genre la suite instrumentale " Monkey Planet (1 et 2) ", complètement barrée, bande son rêvée du remake de la Planète des Singes par Tim Burton (projet d’ailleurs réellement en cours) Basés majoritairement sur un procédé rappelant (toute proportion gardée) Godard : les textes régulièrement croustillants (roses comme la couleur de l’album) consistent en des dialogues (relevant plus de deux monologues simultanés tellement les deux discours sont foncièrement opposés) entre un homme et une femme : " J’ai Faim ", " Alfa Romeo Super Print ", " Ma Femme Américaine ". Le planant " Des Hommes, des Femmes, des Enfants et le Sexe " est lui aussi basé sur un procédé d’opposition systématique parfois assez efficace : " On a fait des Hommes à poigne / pour que les Femmes soient bien battues ". Prenant souvent la pose d’un branché méprisant et dandy, le chanteur rappelle souvent Katerine ou Gainsbourg : comme sur " J’ai Faim " ou sur le franchement anachronique " Une Belle Fille Comme Toi " où des cœurs féminins sortis tous droits de l’époque yé-yé sont traversés par des scratches furieux. L’humour traverse toujours les textes comme le montre un franchement jouissif " On dirait un Mort sur le Banc ", hommage inquiet à… L’inspecteur Derrick ! Ou sur ce " Sur le canapé ", le morceau qu’aurait pu écrire un Etienne Daho défoncé au LSD… Et l’hommage inversé au " Mépris ", à mourir de rire sur " Ma Femme Américaine " : " Est-ce que tu m’aimes ? Non. Est-ce que tu aimes quand je te caresses les cheveux ? Non plus, arrête ! Alors, on s’embrasse pas ? Non, on s’embrasse pas. Ce soir, on couchera ensemble. Non, on couchera pas ensemble." Et puis il y a ce grand, très grand " La Grande Musique " qui à lui seul justifie l’achat de l’album. C’est un trip complètement halluciné, récit d’une chevauchée dérisoire, éthylique et désabusée. Un road movie de samedi soir en région parisienne de 5 minutes 10, qui se transforme en traité de philosophie de banlieue " Écoutez moi tous bande de tarés ! Y a autre chose les gars que les filles, dans la vie ! Y a la grande musique, la littérature, la danse, l’opéra, y a l’architecture, quoi ! ". Que Les Litlle Rabbits se voient donc maintenant en cinéastes au choix de films 70’s, de série allemandes Derrick ou encore de la Nouvelle Vague, nul n’en doute. Et les plus sceptiques consulteront le deuxième CD contenant des vidéos particulièrement allumées, réalisées par les membres de l’équipe. C’est donc bien un vrai cinoche que se font les Little Rabbits, et tous ceux qui se rêvent en un Belmondo désabusé et anachronique d’ " A Bout De Souffle " ou de " Pierrot Le Fou " seront ravis par ce disque salace et jouissif. " Ecoutez moi tous bandes de larves ! Maintenant qu’on a bien rigolé, qu’on a baisé tout ce qu’on pouvait baiser… Levé ce que qu’on pouvait lever, grappillé ce qu’on pouvait prendre, pris de force ce qui venait pas de soit… Faudrait ptêt penser à foutre le camp ! ". A écouter :
The Little Rabbits, "La Grande Musique", 2001, Barclay. |
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