Noir Désir : "Des Visages, Des Figures"

Puis vint le temps du Grand Incendie de " Tostaky " qui avait menacé de les ravager complètement, ne laissant que quelques cendres de leur enthousiasme et de leur exaltation.

Heureusement pour eux, leur heure de gloire les a touché après de nombreuses aventures communes et ne les a pas entraîné dans la dérive classique de la grosse tête, puis de la gueule de bois des lendemains de fête. Leur " One Trip, one noise ", constitué uniquement de remix de leurs chansons nous avait prouvé leur détachement par rapport à leur propre ego, et l’électrique " 666.667 Club " sur leur volonté de continuer, coûte que coûte.

Mais que faire après ? Que leur restait-il à vivre ensemble ?

Comment ne pas retomber dans les mêmes schémas ?

Cette interrogation (et la réponse trouvée par le groupe) fait la force de ce nouvel album " Des Visages, Des Figures ", résolument acoustique.

Il subsiste des éclairs électriques, et non des moindres comme par exemple " Le Grand Incendie ", les furieux " Son Style 1 " ou " Lost ".

Mais la grand nouveauté, c’est le recentrage autour de la mélodie, des paroles, des chansons, de l’acoustique, des voix… Entre " Le Vent Nous Portera " et sa guitare signée Manu Chao qui est peut-être une de leur plus belle chanson et " Des Armes ", une chanson de Leo Ferré qu’il n’avait pas eu le temps de mettre en musique, la voix de Bertand Cantat surprend et émerveille par ses registres insoupçonnés.

Les surprises sont nombreuses sur cet album comme le riff bluesy de " L’Enfant Roi ", les paroles de " L’Appartement " ou de l’impudeur de " Bouquet de Nerfs ", et les aventures soniques de " Des Visages, Des Figures " ou des 23 Minutes ( ! ! !) de " L’Europe " avec la ‘Kéké’ Brigitte Fontaine.

Forcément, il faut parler du prophétique " Grand Incendie ", sorti le jour même du cataclysme planétaire qui nous a tous ravagé, nous laissant pantois et ahuris devant note poste de télévision : le 11 septembre 2001. Écriture hachée, Cut, " C’est l’incendie / le grand incendie / New York City / Hommage à l’art pompier/ Portant leur grande échelle ". Mais que dire ? Rien, bien sur, si ce n’est que celui qui n’a pas vécu le choc des terrifiantes images de ces corps pathétiques sautant de la tour babelienne en flammes en écoutant cette chanson ne saurait imaginer l’impression terrifiante qu’elle a laissé sur nous.

Quel chemin parcouru depuis " Veuillez rendre l’âme… " et pourtant cet album semble une sorte de retour à la maison. Qu’il est agréable de vieillir quand un groupe comme Noir Désir vieillir en même temps que nous…

• Tostaky: L’album de la révélation. Une vraie bombe indémodable.
• One Trip, One Noise : uniquement constituée de remix, parfois très impressionnants, parfois anecdotiques. La preuve de la grande ouverture d’esprit du groupe.