La Discothèque Idéale | ||
RADIOHEAD : "Kid A" | ||
L’album le plus attendu de la rentrée, voire de l’année.
Ca faisait longtemps qu’on avait pas vu un tel buzz autour d’un truc
comme ça…
Très impressionnant… Alors oui, Radiohead est bien le groupe le plus intéressant de sa génération. Oui, ils ont encore changé de style (dommage pour tous les médiocres qui avaient collé comme des mouches aux empreintes laissées par le somptueux " OK Computer "). Par contre, quant à savoir si vous n’allez pas être déçus, ça c’est une autre histoire… Outre le fait que la pochette soit franchement hideuse (quoique j’aime bien les dessins sur papier calque) comparée à celle de " OK Computer " qui était vraiment très réussie, je pense que la musique va, à vous aussi, vous causer un choc dans un premier temps. Impossible d’écouter ça au travail par exemple. Difficile en voiture. Passer ça lors d’un dîner entre amis et tout le monde part avant le café en vous traitant de maniaco-dépressif. Bref, voilà un disque qui ne laisse pas indifférent et qu’il faut bien prendre le temps d’écouter. Et il est bien difficile de ne pas parler de chaque chanson tant elles se révèlent toutes surprenantes. Le parti pris de mettre de coté les guitares omniprésentes des débuts et de se lancer dans les expérimentations sonores se révèle dés le lancinant et superbe " Everything In Its Right Place ". La voix de Thom Yorke est mutilée par des effets et accompagnée par un motif assez simple de clavier. " Kid A ", le morceau, est un hommage clair à Kraftwerk et c’est probablement de ce coté qu’il faudra chercher les racines de cet album étrange… Plus étonnant encore, " The National Anthem ", soutenue par une basse puissante (quasiment du ‘Bredders’ !), mélange allégrement samples symphoniques et cuivres qu’on croirait sortis d’un orchestre de Charles Mingus… Il faut attendre le quatrième morceau pour qu’une structure classique (guitare sèche, ect… Les premières notes de guitare de l’album ?) fasse son apparition et l’on est servi avec le fabuleux " How To Disappear Completely ". Inquiétantes, les paroles de Thom sont nébuleuses à souhait :" I’m Not Here, This Isn’t Happening ". Celles ci révèlent pourtant la nouvelle orientation du groupe qui travaille sur l’omission, la suggestion et l’absence. Faisant suite à un morceau atmosphérique "(" Treefingers "), " Optimistic " réveille ceux qui avaient déjà terminé leur pétard avec ses guitares électriques (nettement moins que sur les albums précédents tout de même), enchaîné avec un " Limbo ", tout en perdition (" I’m Lost At Sea "). Plus électronique et plus surprenant, le torturé " Idiotheque " et ses paroles qui se situent en porte à faux avec celles de " How To Disappear Completely " : " This Is Really Happening ". Un relatif apaisement intervient avec " Morning Bell " et ses lignes de guitares superbes, électroniquement traitées et qui se poursuit sur le tranquille " Motion Picture Soundtrack ". Radiohead revient de loin et le sait très bien. Le succès phénoménal du disque " OK Computer ", qui aurait fait péter les plombs à n’importe qui, aurait du les inciter à se prendre pour le nouveau U2 (qui avaient crus révolutionner un genre avec leur tiède " Pop "). Drôle de démarche de leur part (qu’il faut saluer) d’avoir pris le parti inverse et d’avoir cherché par tous les moyens à " disparaître complètement ". On comprend que le livre dont est tiré le titre de la chanson ait profondément inspiré le groupe. Les paroles qui se révélaient autrefois seulement hermétiques sont maintenant franchement incompréhensibles en raison, entre autres, des nombreux effets trafiquant le voix du chanteur. Je me souviens de mes premières écoutes de " OK Computer " qui m'avaient laissé pour le moins perplexe, avant de devenir un de mes albums préférés. " Kid A " révèle les mêmes surprises et se révèle lui aussi tout doucement. Dans mon opinion, " Kid A " se révèle le digne successeur du disque précédent et j’aurais même envie de le qualifier de premier disque électro-progressif (pour la durée des pistes, le travail sur les sons, le concept général de l’album). On n'y trouvera pas de grandes envolées lyriques guitaristiques mais plutôt des recherches électroniques surprenantes dans la grande lignée des groupes de krautrock allemand. Attention, toutefois, cet album n’est pas confortable. On ne trouvera ici ni confort ni réconfort mais plutôt un groupe en évolution et en révolution, en perpétuelle quête. A écouter :
Radiohead, "Kid A", 2000, EMI. |
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